J’ai eu deux vies de coureuse. De 1998 à 2005 et de fin 2010 à maintenant. Entre les deux j’ai écouté mon orthopédiste qui m’avait dit: «Vous ne courrez plus jamais. Vos deux genoux sont finis. Vous devez faire autre chose!»

OK, là! Relisez le premier paragraphe, c’est important! Je sais, vous êtes un peu déconcentrés par tout ce que vous avez dans la tête en ce moment, mais go! Relisez !

En 2014 j’ai fait quatre (4) marathons. Cette année, en 2015, j’en suis à mon deuxième. Je me lance dans un ultra marathon dans trois semaines à Bear Mountain dans l’état de New York. Un 50 km de sentier. Ça sera une autre découverte. Probablement, aussi une découverte de moi-même. Mal aux genoux? Euh, non pas du tout! Pourquoi demandez-vous ça?

Pour moi la course c’est la vie.
Ces cinq années de course m’ont été volées.

C’est pourquoi courir est maintenant une récompense. Quels que soient la température, la difficulté, la fatigue, l’agenda ultra-chargé. Courir, c’est un cadeau pour moi. C’est de moi à moi. Loin du clavier, loin de l’artificiel. Courir c’est être près de moi. Près de ma nature, près de mon essence même.

Comme coureuse, j’ai le grand bonheur de pouvoir changer, me défier, m’améliorer, choisir différentes méthodes de fois en fois, modifier mes objectifs. J’ai la chance de changer sans devoir tout remettre en question. Cela me donne de la force, de l’équilibre, de la confiance, de la liberté aussi. Je me permets d’expérimenter. Le résultat: je me connais mieux.

L’an dernier, j’ai fait un marathon en voulant juste le faire. C’était mon dixième. Je voulais le terminer. Étant sous-entraînée pour cause de blessure, je n’avais pour objectif que de me protéger en allant au bout de cette aventure. Je ne pouvais quand même pas manquer Boston!

Bien, cela a été mon marathon le plus lent et le plus beau à vie! J’avais enfin compris comment courir relax. Et aussi comment juste respirer. Je veux dire inspirer, expirer, inspirer, expirer, puis faire avancer cette incroyable machine que j’ai juste à moi. À me dire tout le long: «Pourquoi voudrais-je que quelque chose d’aussi merveilleux s’arrête rapidement?»

Cela a été une découverte pour moi. Au pays de la recherche de PB (personnal best), je venais de découvrir le PH (personal happiest)!

Depuis, j’ai fait San Francisco tout relax. Un autre PH! Puis Toronto où la maladie du PB a refait une petite apparition. Puis Philadelphie, encore sous la maladie du PB. Là, j’ai compris la leçon! C’est assez la course au PB! Je n’en veux plus! Je veux juste trottiner vers la ligne d’arrivée. En dessous de mes capacités? Sans doute et puis quoi? Je n’irai jamais aux Olympiques de toute façon!

Donc Walt Disney en janvier ou j’ai encore réussi un Personal Happiest! J’avais mon tutu rose. J’ai vu Mickey, Donald, Yogi l’Ours et plusieurs autres. Je les ai pris en photos, j’ai même eu la chance de me faire prendre en photo avec eux pendant la course.

Et puis, dimanche dernier le 12 avril, à Paris, j’ai fait un record! Mon PH est au max! J’ai pris des tonnes de photos, en voici quelques-unes. J’ai filmé des coureurs à la course pour préparer une conférence sur la technique de course que je donne bientôt. J’ai filmé une quinzaine de coureurs. J’ai bu du vin de l’Alsace offert sur le parcours par des gens qui organisent le marathon d’Alsace. J’étais autour du 35e km et ça n’a rien changé. J’ai continué à être euphorique!

J’ai regardé, admiré, senti, souri, bien plus que j’ai couru. J’ai arrêté à chaque ravitaillement. Pris le temps de boire et manger. De remercier les bénévoles. De mettre mes déchets dans les poubelles ou dans les bacs de recyclage, regarder s’il y avait quelque chose de beau à prendre en photo. Bref, j’ai pris mon temps. Aucun stress. Puis, repartir en trottinant avec mon I Phone collé au fond de ma main, prêt à toutes éventualités. Quels moments magiques. Je ne courrai plus pour être vite. Parce que vous savez quoi, je ne suis pas vite. Je suis moi. C’est quoi être vite? Il y a de toute façon toujours quelqu’un de plus vite que soi et de plus lent. Et puis quoi? Les «pas vites» on les fout au cachot? Mais non, on leur met un beau dossard de marathon et on les lance en disant: « Allez, va t’amuser ma Pitchounette!», comme me dit mon Lionel à chaque marathon!

Je cours pour être heureuse.
Voilà!
C’est si simple, non?

Et en passant, ça me rend plus forte. Plus déterminée, plus énergique. Ça fait que ma vie est bien plus belle.

Mon orthopédiste s’était trompé. Mes genoux, ils aiment ça courir! Ils en raffolent!

Et pour vous qui vous posez la question: quel entraînement elle fait pour réussir des BH comme ça? Bien, un entraînement sérieux où je travaille fort. Qu’il pleuve ou qu’il neige, je sors courir. Je suis persévérante et j’accumule les kilomètres. Douze mois par année, je suis dehors dans les rues ou sentiers. Je n’arrête pas quelques mois pour prendre ça relax. Je veux dire; pour mériter un tel bonheur, il faut avoir travaillé fort, non?